André Laliberté, fondateur

Photo: Léon Gniwesch
André Laliberté, Fondateur

« Je suis, paraît-il, arrivé à un âge que l’on qualifie de respectable. Mais je dois vous faire un aveu : je joue encore à la poupée ! C’est du moins l’impression que j’ai, parfois, quand je me retrouve à vouloir raconter une histoire à l’aide de ces pantins que sont les marionnettes. Comme, lorsque j’étais enfant, j’inventais avec mes soldats, cowboys et indiens de plomb (ce détail trahissant mon âge), des batailles mémorables, des embuscades téméraires et des aventures picaresques. Ce qui est merveilleux avec la marionnette, c’est que le jeu est toujours différent tant sont multiples les possibilités de cette forme de théâtre. C’est pourquoi je suis resté cet éternel enfant qui s’amuse à faire vivre ces bouts de bois et de chiffons, espérant vous faire rire… et peut-être aussi vous émouvoir. »

André Laliberté a eu la piqûre des marionnettes pendant un séjour à l’hôpital pour enfants, où était présenté un spectacle des Marionnettes de Montréal de Micheline Legendre. Il se formera auprès de cette compagnie pendant une dizaine d’années, avant de fonder la sienne, le Théâtre de l’Œil, en 1973 avec Francine Saint-Aubin.

À la barre de son navire jusqu’en 2020 comme directeur général et artistique, il a joué, interprété, manipulé, écrit et mis en scène bon nombre des productions du Théâtre de l’Œil. Artiste avisé, il sait s’entourer de concepteurs et d’écrivains reconnus pour fabriquer un théâtre exigeant et raffiné, construisant un véritable répertoire pour marionnettes, dont plusieurs des spectacles ont tourné à l’échelle mondiale. Créateur impliqué dans son milieu, il est une des trois chevilles ouvrières de la fondation de la Maison Théâtre à Montréal, en 1982.

Reconnu par ses pairs, devenu expert en la matière, il aime à transmettre les ficelles du métier, qui pour lui est bien plus qu’un métier : une véritable passion.  Le 4 novembre 2020, il se voit octroyer le prix Albert-Tessier pour sa contribution dans le domaine des arts de la scène au Québec. Il devient ensuite Compagnon de l’Ordre des arts et des lettres du Québec en 2022.

Historique

Le Théâtre de l’Œil a vu le jour à Montréal en 1973, porté par la vision d’André Laliberté et Francine Saint–Aubin, qui ont été rapidement rejoints par Jocelyn Desjarlais, un autre marionnettiste chevronné. La passion de ces trois artistes en marionnettes avait pris racine au sein des Marionnettes de Montréal, sous la direction de Micheline Legendre. En 1975, suite au départ de Francine, André a déniché Pierre Tremblay, qu’il a formé aux techniques de la marionnette. Pierre allait plus tard rejoindre André et Jocelyn pour former un trio artistique qui a dirigé la compagnie pendant près de 10 ans. Après le départ de Jocelyn et Pierre, André Laliberté a continué de manière exceptionnelle jusqu’en 2020, totalisant 47 années de direction artistique et 28 productions. En 2020, Simon Boudreault a pris les rênes de la compagnie, ayant lui-même contribué en tant que marionnettiste, auteur et metteur en scène au sein de l’Œil.

Dès ses débuts, le Théâtre de l’Œil s’est passionné pour une variété de techniques marionnettiques, incluant les marionnettes à tige, à gaine, le théâtre d’ombre, le masque, et plus particulièrement la technique de type bunraku. En plaçant l’art de la marionnette au cœur du théâtre visuel, la compagnie a mené des recherches approfondies, donnant naissance à des productions saluées par le public et les professionnels du secteur. Au début des années 80, le Théâtre de l’Œil fut l’un des acteurs clés dans la création de l’Association québécoise des marionnettistes (AQM). En 1983, la compagnie a également été sélectionnée pour représenter le Canada en Chine avec sa pièce Regarde pour voir, marquant une étape majeure en tant que première tournée d’une production canadienne en Chine après la révolution culturelle. Dans la même année, le Théâtre de l’Œil poursuit son rôle de bâtisseur en devenant l’une des compagnies fondatrices de la Maison Théâtre à Montréal.

Dans les années qui ont suivi, la compagnie a brillé à l’échelle internationale. L’engagement continu dans la recherche et le développement des techniques et des éléments scéniques innovants a abouti à des œuvres d’une beauté visuelle exceptionnelle, à l’image de Le Porteur (1997), un poème visuel sans paroles. Ce spectacle a été joué plus de 800 fois à travers le monde au cours des deux décennies qui ont suivi.

Le Théâtre de l’Œil a toujours cherché à renouveler les univers abordés en collaborant avec divers auteurs et collaborateurs. Ainsi, Michel Tremblay, Marie-Louise Gay, Michelle Allen, Louise Bombardier, Larry Tremblay et d’autres ont écrit des textes originaux pour la compagnie. Des metteurs en scène tels que Martine Beaulne, Olivier Reichenbach, Simon Boudreault, Catherine Vidal, Olivier Kemeid, ainsi que des compositeurs tels que Libert Subirana (du groupe Harmonium), Silvy Grenier, Michel F. Côté, ainsi que de nombreux autres concepteurs, dont l’artiste visuel Richard Morin et le scénographe Richard Lacroix, ont participé à la création des productions de la compagnie, certains devenant des collaborateurs réguliers. En 2023, l’autrice Fanny Britt et l’autrice-compositrice-interprète Ariane Moffatt se sont jointes à la grande famille de l’Œil pour créer 176 pas

En tant que compagnie de tournée, le Théâtre de l’Œil compte aujourd’hui 31 productions et a largement diffusé ses spectacles au Québec, au Canada et dans le monde entier. Des tournées ont été réalisées aux États-Unis, notamment au prestigieux Kennedy Center à Washington et au New Victory Theater à New York, ainsi qu’au Japon, en Corée du Sud, en Suisse, au Mexique, en Allemagne, en Angleterre, en Espagne, en Irlande, aux Pays-Bas, au Danemark et en Chine. Désormais internationalement reconnue, la compagnie est fière de promouvoir l’excellence québécoise à l’étranger.

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